La prêtresse avait demandé à plusieurs reprises à la draeneï de les utiliser alors qu’ils franchissaient les montagnes d’Ymirheim mais la mage avait toujours refusé. Noem’Aeda avait expliqué qu’une fois que les effets de la potion se dissipaient, toute la fatigue qui aurait du s’accumuler s’abattait d’un seul coup sur l’utilisateur, le plongeant dans un état extrême d’épuisement physique et mental. La draeneï avait donc conservé ses fioles à l’abri de son sac malgré le temps qui jouait en leur défaveur.

En découvrant ces objets dans les affaires de sa défunte amie, l’humaine y avait vu comme un espoir, un cadeau du ciel. Risquant le tout pour le tout, elle s’était résolue à absorber le contenu d’une fiole, la partageant avec Nathaël. Elle ne savait alors pas quelle serait la durée des effets de la potion et avait découvert par la suite qu’une demi fiole permettait de veiller pendant cinq jours, soit dix jours pour la totalité d’un des récipients.

Asnath n’avait osé imaginer la fatigue intense qui s’abattrait sur eux lorsque les effets se dissiperaient, ils n’avaient plus le choix. Dès qu’ils auraient posé un pied au-delà de la Déflagration, ils ne pourraient s’accorder le luxe de dormir, trop de créatures pourraient les attaquer pendant leur sommeil.

Il leur avait ensuite fallut trouver un moyen de devenir invisible aux yeux des morts-vivants, ou tout du moins inodores. En effet, comme le lui avait souligné le paladin quelques jours avant qu’ils ne franchissent Corp’Rethar, la porte de l’Horreur, ils portaient tous deux une odeur caractéristique qui ne manquerait pas de les faire repérer, celle des vivants. Ils étaient alors partis à la recherche de soldats du Fléau auxquels ils pourraient voler leurs habits. Ils avaient fini par trouver deux apprentis nécromanciens qui avaient eu la mauvaise idée de s’isoler et avaient fini la gorge tranchée par la lame de l’elfe.

Près d’une semaine avait été nécessaire par la suite pour franchir Corp’Rethar et traverser une partie de la Cour des Ossements sans se faire repérer, bien qu’à plusieurs reprises ils aient manqué de peu d’être découverts. Les plus dangereux étant les sournois geists qui se terraient facilement dans l’ombre, alliant une grande discrétion à une intelligence supérieure à celle des goules qui ne distinguaient qu’à grand peine ceux de leur propre camp.

C’était ainsi qu’Asnath et Nathaël se retrouvaient finalement au pied de la Cathédrale des Ténèbres, dissimulés le long d’un des contreforts. Ils comptaient rejoindre le rempart qui partait de l’arrière de l’édifice pour rejoindre la Citadelle et tenter d’y pénétrer discrètement. L’humaine trouvait une certaine ironie cruelle dans le fait qu’ils soient partis de l’extrémité est de la Cour pour finalement tenter de pénétrer dans la Citadelle par l’ouest en aillant réalisé le tour complet.

- Combien sont-ils ? demanda Nathaël en posant sa main sur la poignée de son épée, prêt à la dégainer.

- Six, deux mages sombres et quatre apprentis si je ne me trompe pas.

- Que faisons-nous ?

- Tout d’abord nous attendons de voir s’ils bougent, déclara la prêtresse à mi-voix, sinon il nous faudra trouver un moyen de les distraire suffisamment de temps pour que nous puissions monter les escaliers.

- Nous pourrions aussi y aller en nous faisant passer pour deux des leurs.

Asnath se retourna vers le paladin et le dévisagea un instant. Son idée n’était pas aussi folle qu’elle n’y paraissait au premier abord, cependant, elle doutait de sa réussite.

- Ils risquent de nous poser des questions auxquelles nous ne pourrions répondre.

- Il nous suffira de les ignorer, répondit l’elfe de sang, si nous passons à côté d’eux sans leur accorder un regard et en nous montrant sûrs de nous, ils n’auront aucun doute. Nous ne devrions pas être les premières personnes à se considérer comme les serviteurs personnels du Roi Liche qu’ils verront.

- Et s’ils nous abordent quand même ?

- N’y pensons pas.

- Parfait, déclara la prêtresse en inspirant profondément pour calmer les battements de son cœur, allons-y alors.

Ils sortirent tous deux de leur cachette et prirent l’attitude la plus hautaine qu’il leur était donné d’avoir. Nathaël excellait dans ce rôle bien mieux qu’Asnath et c’est naturellement qu’il la dépassa pour marcher devant elle. La prêtresse remarqua alors l’épée de son ami qui formait un relief sous la robe d’emprunt du paladin. Elle se plaça donc à hauteur de l’elfe afin de masquer la forme caractéristique qui ne manquerait pas d’attirer l’attention.

Les mages noirs levèrent la tête vers eux puis, en voyant le visage qu’arborait l’elfe, ils répondirent en lui lançant un regard dédaigneux et retournèrent à leurs occupations. Asnath avait des difficultés à garder son calme alors qu’ils avançaient sans encombre sur le parvis de la cathédrale. A chaque fois qu’ils croisaient un groupe de nécromanciens, son cœur s’emballait, tambourinant si fort dans sa poitrine qu’elle avait l’impression qu’on pouvait l’entendre à plusieurs mètres à la ronde. Et comme pour répondre au puissant flux de sang qui pulsait dans ses veines, les maux de tête de la jeune femme ne la quittaient plus, se faisant plus intenses à chaque instant.

Cette douleur qu’elle avait espéré ne plus ressentir était reparue après la capture d’Ellécnite et Omundron. Encore lente et sourde, elle était passée presque inaperçue dans le tumulte des événements qui avaient eu lieu. A la suite de la mort de Noem’Aeda, elle s’était manifestée avec plus de force, comme un écho de la douleur de la main brisée et du cœur blessé de la prêtresse. Les pulsations de sa main avaient disparues avec les soins que Nathaël lui avait imposé, mais la migraine était restée, plus forte. Asnath avait cependant finit par s’y habituer et il n’y avait que lorsqu’elle se trouvait à proximité des créatures et soldats du Fléau qu’elle la ressentait plus fortement.

Le contournement de la Cathédrale des Ténèbres leur prit deux heures car afin de ne pas éveiller l’attention, ils avaient du prendre leur temps et se comporter comme les fidèles du Roi Liche qui les entouraient. Une fois arrivés à l’arrière de l’édifice, ils s’éloignèrent le plus discrètement possible et cherchèrent un accès pour monter au niveau du chemin de ronde qui parcourait le rempart jusqu’à la Citadelle. Ils finirent par le trouver et une fois qu’ils l’eurent rejoins, ils s’accordèrent quelques minutes de repos.

Asnath prit dans son sac une des fioles de Noem’Aeda et en but une longue gorgée puis la passa à Nathaël. En effet, après qu’ils aient constaté la longueur des effets de la potion, ils avaient décidé de ne pas vider les fioles en une fois mais de prendre une gorgée à chaque fois qu’ils sentaient la fatigue les rattraper. Ils attendirent que la potion eût chassé la fatigue de leurs membres puis ils se préparèrent à repartir. En voyant Nathaël se lever et commencer à retirer son déguisement, l’humaine s’alarma.

- Que fais-tu ? Tu souhaites notre mort ?

- Je ne pense pas que les apprentis ont le droit de se promener sur le rempart, répondit le paladin à voix basse en retirant la robe qui masquait son armure, et si nous sommes repérés, je préfèrerai pouvoir conserver ma liberté de mouvement.

L’elfe de sang avait raison, aucun déguisement ne pourrait justifier leur présence dans un endroit que seuls fréquentaient les immenses squelettes qui formaient la garde de la Citadelle. Aussi la prêtresse imita-t-elle son ami et abandonna-t-elle les sombres robes qui la couvraient. Elle regretta un instant de s’être ainsi débarrassée de ces épaisseurs supplémentaires lorsque le froid polaire du glacier la saisit, puis elle se réchauffa petit à petit.

Une nouvelle journée s’écoula durant laquelle les deux compagnons progressèrent en direction de la Citadelle. Leur voyage se voyait ralenti par les multiples précautions qu’ils devaient prendre afin de ne pas être vus par les gardes qui patrouillaient sans cesse le long du chemin de ronde, guettant quiconque tenterait d’atteindre la forteresse du Roi Liche.

Alors qu’une nouvelle fois le soleil se couchait à l’ouest du glacier, Asnath et Nathaël atteignirent enfin l’extrémité du rempart et sa jonction avec la Citadelle. Afin d’étudier la situation et d’élaborer une stratégie, ils prirent quelque temps pour se préparer. C’est ce moment que le paladin choisit pour rompre le silence qui était devenu leur quotidien depuis si longtemps.

- Asnath, je peux te poser une question ?

La prêtresse leva les yeux vers Nathaël et le dévisagea, son regard signifiant son étonnement à voir l’elfe de sang faire preuve d’une quelconque curiosité.

- Vas-y… répondit-elle d’une voix qui ne parvenait pas à masquer ses soupçons.

- Pourquoi t’acharnes-tu autant dans cette quête ?

- C’est toi qui m’a poussée à ne pas abandonner après la mort de Noem’Aeda.

- Je ne parle pas de maintenant en particulier, mais depuis le début.

En comprenant que la prêtresse ne répondrait pas tant qu’il n’aurait pas exprimé plus clairement sa pensée, le paladin poursuivit.

- Ce que je cherche à comprendre, c’est pourquoi tu nous as convaincus de faire cette expédition. Alors que tu es la seule d’entre nous qui n’ait jamais eu aucun lien avec les Reliques. Contrairement à nous tous, tu n’étais nullement associée aux gardiens, alors pourquoi ?

- Je me sens… concernée, répondit la jeune femme en observant le sol sombre.

- Plus que nous-mêmes l’étions ?

- C’est possible.

- Pourquoi ?

- J’ai mes raisons.

- Cela ne me suffit pas comme explication, répliqua le paladin d’une voix plus tranchante.

- Tu devras pourtant t’en contenter, déclara Asnath en plongeant son regard émeraude dans les yeux verts éclatants de son compagnon, pourquoi tant de questions et surtout, pourquoi maintenant ?

- Pour rien, répondit l’elfe en se relevant et en lui tournant le dos, j’essayais juste de te connaître mieux.

- Le moment est mal choisi, tu auras tout le temps de me poser des questions lorsque nous aurons récupéré ce que nous sommes venus chercher et… Nathaël baisse-toi !

La jeune femme avait crié ces dernières paroles car à l’instant où elle achevait sa phrase, une gargouille avait surgit depuis la base du rempart et l’avait survolé à toute vitesse. Impossible que les deux intrus aient échappé au regard vigilant de cette sentinelle volante dans quelques instants une patrouille serait détachée pour venir s’occuper d’eux.

- Cours ! ordonna-t-elle à l’elfe en s’élançant vers la Citadelle.

- Mais nous nous dirigeons droit sur l’ennemi ! protesta Nathaël.

- Peu importe, nous sommes déjà repérés ! Essaie de trouver un endroit où nous cacher !

Pendant ce temps, la gargouille avait disparut. Cette absence représentait à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle. La mauvaise était qu’elle avait sans aucun doute donné l’alerte, la bonne était que se faisant elle les avait perdus de vue et aurait avec un peu de chance plus de mal à les retrouver. Derrière eux, aucun bruit de poursuite ne se faisait entendre mais il était inutile de prendre le risque de rester au même endroit.

Courant sur le parapet du rempart aussi vite que leur permettaient leurs jambes, Asnath et Nathaël parvinrent à atteindre la Citadelle sans alerter d’autres créatures. Lorsqu’il fallut choisir une direction, la prêtresse s’élança sans hésitation en direction de la partie sud de la Citadelle, celle qui dominait Angrathar, la porte menant à la Désolation des Dragons. Cette partie de la forteresse serait moins fréquentée, du moins la jeune femme l’espérait-elle.

Après une demi-heure de course, les deux fuyards furent forcés de ralentir leur allure car les effets de la potion de vitalité s’étaient estompés plus vite que prévu du fait de l’effort qu’ils venaient de fournir. Tremblant comme une feuille, Asnath observa les alentours puis s’assit au bord du rempart, adossée à une imposante pique de pierre creusée sur ses côtés qui lui permettait de se dissimuler en partie. Nathaël resta debout près de la prêtresse le temps que celle-ci retrouve les fioles contenues dans son sac.

Soudain, comme surgissant du néant, la gargouille tomba du ciel et s’abattit sur Nathaël avec force, lui faisant perdre l’équilibre. L’elfe et la gargouille basculèrent tous deux dans le vide. Asnath eut un réflexe fulgurant et parvint à attraper le bras de Nathaël avant qu’il ne tombe dans le vide. Entraînée par le poids du paladin, la prêtresse fut attirée vers le vide et parvint de justesse à stopper sa course mortelle en bloquant son pied dans une anfractuosité du sol.

La gargouille reçut un fort coup de la part de l’elfe qui la pétrifia, elle tomba donc la première du rempart et disparut dans la brume qui masquait la base du glacier. Nathaël lui était suspendu dans le vide, uniquement retenu par la main d’Asnath qui faiblissait de plus en plus rapidement à mesure que les effets de la potion la quittaient.

- Je… je vais te passer… une des fioles, dit-elle au paladin en serrant les dents pour ne pas lâcher prise, tu… vas la boire… et tu pourras remonter le long de mon bras…

- Non, répondit Nathaël, si tu fais cela tu ne pourras pas te retenir et nous tomberons tous les deux. Il faut que tu me lâches.

- C’est… hors de question ! Si tu veux… mourir en héros, trouve un autre… moyen.

- J’ai toujours une chance de survivre, répondit l’elfe d’une voix douce, souviens-toi, je suis un paladin, la puissance de la Lumière est capable de me préserver d’une chute mortelle.

- Mais la Lumière est affaiblie ici ! lui cria l’humaine, elle ne pourra pas te sauver !

- Elle est affaiblie uniquement parce que tu ne crois plus autant en son pouvoir. C’est toi qui m’as appris que croire en la Lumière ne faisait qu’accroître sa force ! Asnath, d’autres vont arriver, la gargouille a donné l’alerte, si tu restes ici tu es morte !

Le pied de la prêtresse ripa sur la pierre qui lui servait de prise et Nathaël entraîna un peu plus son amie avec lui vers le vide.

- Je ne te laisserai pas… tomber, déclara la jeune femme dont le visage se crispait alors qu’elle tentait en vint de hisser le paladin.

- Je n’ai pas dit que c’était à toi de me laisser tomber.

Avant que l’humaine ne puisse comprendre le sens de ces paroles, le paladin tira un poignard qu’il dissimulait dans sa botte et le planta dans la roche du rempart. Avec le peu de force qu’il lui restait, il parvint à s’élever de suffisamment pour que ses lèvres viennent toucher celles de la prêtresse.

- Je reviens te chercher le plus vite possible, lui murmura-t-il, fais attention à toi.

Il retira le couteau fiché dans la roche puis il transperça de part en part la main de la jeune femme qui s’ouvrit d’un seul coup, laissant Nathaël chuter de plus en plus vite vers la brume qui recouvrait le sol et l’engloutit bientôt.

Il fallut du temps avant qu’Asnath comprenne ce qui venait de se passer, et encore plus longtemps pour finalement se rendre compte de la douleur qui embrasait sa main. Le couteau de Nathaël y était toujours planté, transperçant cruellement sa paume. La jeune femme retira la lame d’un coup sec en serrant les dents pour ne pas s’évanouir puis elle lâcha la dague qui tomba dans le vide. Le premier réflexe qu’elle eut ensuite fut de porter ses doigts ensanglantés à ses lèvres, les tachant de sang en y laissant une macabre traînée cramoisie.

Tout lui semblait si irréel, elle ne pouvait pas avoir perdu Nathaël, c’était impossible, tous ses compagnons lui avaient été arrachés si vite, trop vite. Le sort ne pouvait se montrer aussi cruel à l’encontre d’une seule personne et Nathaël ne pouvait pas avoir agit comme il l’avait fait avant de lâcher prise. Elle ne pouvait que vivre un cauchemar, elle allait se réveiller.

Le cauchemar était cependant bien réel et alors que finalement la jeune femme parvint à se redresser, elle prit appui sur sa main gauche tachée de sang, et le sortilège qu’ils avaient créé, tous les cinq, se déclencha. Les glyphes écarlates s’étendirent au sol, créant un gigantesque motif dont le rouge éclatant contrastait avec la sombre pierre sale du rempart. Asnath reprit ses esprits, le symbole émettait suffisamment de puissance magique pour être repérer par les magiciens du Fléau, elle devait trouver un abri.

D’un mot, la prêtresse stoppa le flux de sang qui s’échappait de sa main puis elle se releva, s’empara de son sac de voyage et s’élança vers la Citadelle, elle devait s’éloigner le plus possible du rempart. Malgré sa fatigue, sa peur d’être rattrapée fut assez forte pour qu’elle puisse courir de nouveau, avançant péniblement à la recherche d’un endroit où elle pourrait se cacher le temps de retrouver ses esprits et de reprendre des forces. Elle trouva finalement un renfoncement dans l’épais mur de pierre de la Citadelle, à l’abri des regards venant de l’extérieur, où elle pourrait être en sécurité pendant quelque temps.

Epuisée, la prêtresse s’écroula et resta prostrée dans sa cachette. Combien de temps resta-t-elle ainsi assise dans le noir les genoux sous son menton, elle n’aurait su le dire, quelques minutes, quelques heures, quelle importance. Les effets de la potion disparaissaient, la laissant en proie à un état d’hébétude qui confinait à la folie. Un instant, elle envisagea de rester là où elle se trouvait, de s’allonger et de dormir, mais il ne le fallait pas. Elle devait continuer, pour les Reliques, pour ses amis, pour les venger, pour elle.

Au prix d’un effort qui lui parut irréalisable, l’humaine parvint à sortir de sa prostration et tendit la main vers son sac. Du bout des doigts, elle parvint à atteindre sa dernière fiole, elle avait confié les autres à Nathaël afin qu’ils puissent en avoir en réserve s’ils étaient obligés de se séparer d’un de leurs sacs. Elle crut ne jamais pouvoir ouvrir le flacon et lorsque finalement elle réussit, le flacon lui échappa des mains et se brisa en mille éclats. Résignée, la jeune femme écarta les morceaux de verre et essaya d’imbiber un morceau de sa robe de potion avant de le porter à sa bouche afin de récupérer un peu du précieux liquide.

Le résultat ne fut pas aussi spectaculaire que si elle avait absorbé l’intégralité de la potion, mais Asnath se sentit enfin la force de se lever. Elle essaya de ne pas penser à Nathaël de peur d’être de nouveau trop abattue pour pouvoir bouger. Pourtant tant de questions se pressaient dans sa tête, avait-il survécu ? Pourrait-il tenir sa promesse de venir la chercher ? Autant de questions auxquelles elle n’avait aucune réponse mais elle ne devait pas y penser.

Décidée à poursuivre son chemin coûte que coûte, Asnath choisit d’abandonner son sac qui l’encombrait et ne choisit de garder que le strict minimum. Les dagues d’Omundron et Izdar, le pendentif que ses amis lui avaient offert, la figurine de Naarok, la carte et la pierre d’âme de Noem’Aeda. Elle laissa le reste sur place, rabattit la capuche de son manteau sur sa tête et sortit de son abri.

Désormais seule et sans aucun espoir de recevoir de l’aide, la prêtresse réfléchissait à un moyen de pénétrer à l’intérieur de la Citadelle. La porte principale semblait la solution la plus simple, mais il lui serait impossible de dissimuler sa présence aussi facilement qu’auparavant. Les gardiens de la forteresse ne mettraient que quelques secondes à la repérer et elle ne pourrait rien faire pour se protéger.

Son seul espoir était de parvenir à découvrir une entrée moins surveillée que les autres, une place forte telle que celle-ci ne pouvait pas ne posséder qu’une seule entrée. La jeune femme devait trouver un des accès secondaires en espérant qu’il serait plus vulnérable à une intrusion discrète. Cette recherche lui prendrait sans doute du temps et il lui faudrait trouver un endroit discret pour pouvoir se reposer sans craindre d’être découverte pendant son sommeil.

Malheureusement, Asnath n’eut pas le temps de poursuivre ses réflexions plus en avant car à cet instant arrivèrent plusieurs soldats qui, de toute évidence, étaient à sa recherche. Ses poursuivants étaient au nombre de huit, il y avait une gargouille, quatre goules, deux nécromanciens et même un guerrier mort-vivant. Impossible qu’ils ne trouvent pas la prêtresse qui se trouvait seule dans cette partie de la Citadelle et qui avait abandonné son déguisement en même temps que Nathaël. Ils la repérèrent dès qu’ils furent à sa portée.

La réaction de la jeune femme fut instinctive. Elle incanta immédiatement son bouclier puis lança un sort d’entrave à la gargouille afin qu’elle ne puisse pas prendre son envol. Sachant qu’elle ne pouvait pas se mesurer à ses autres adversaires, elle choisit la fuite. Désormais, le moment n’était plus à la discrétion mais à la survie, aussi ne prit-elle aucune précaution lorsqu’elle choisit de continuer de longer le contrefort de la Citadelle. Cette décision l’amena à passer du mauvais côté de l’édifice, le versant nord où se trouvaient tous les soldats du Fléau.

N’ayant plus aucune échappatoire, Asnath puisa dans ses faibles ressources pour courir jusqu’à l’escalier qui descendait jusqu’à la Cour des Ossements. Cependant elle ne fut pas assez rapide et vit plusieurs créatures se dresser en travers de son chemin pour lui barrer la route. Changeant brusquement de direction, la prêtresse tenta le tout pour le tout et sauta du parapet qui dominait le bas de la Citadelle. Au moment où elle quitta le sol, l’humaine utilisa son sort de lévitation pour ralentir sa chute et ne pas se briser les os.

Arrivée au niveau de l’émergence de la forteresse, la jeune femme voulut prendre quelques secondes pour reprendre son souffle mais déjà ses poursuivants avaient sauté après elle, au prix de leurs os pour la plupart, et se ruaient à sa poursuite.

Avisant un trou dans le mur de la Citadelle, Asnath s’engagea immédiatement dans cette brèche en espérant ne pas tomber dans un autre piège. Au lieu de cela, elle déboucha sur une immense pièce ronde au centre de laquelle se trouvait un gigantesque puits. Elle comprit qu’elle venait de pénétrer dans les fondations de l’édifice où personne ne se rendait habituellement.

En entendant le tumulte que faisaient ses poursuivants, la jeune femme fit le tour de la pièce dans le but d’y trouver une autre sortie mais trop tard, toutes les issues potentielles se virent bloquées par toutes sortes de créatures assoiffées de sang, de son sang. Tandis que quelques unes d’entre elles avançaient, Asnath reculait pas à pas vers le puits géant dont la profondeur était telle qu’on n’en voyait pas le fond. Finalement, la prêtresse fit un dernier pas en arrière qui l’amena au bord du gouffre.

Un terrible choix se posa à elle, tenter l’affrontement avec la dizaine de créatures qui lui faisaient face et toutes celles qui l’attendaient à la sortie, ou sauter dans le puits en espérant trouver de l’eau au fond. Asnath choisit la seconde solution. La prêtresse fit un pas en avant afin de prendre de l’élan et de sauter le plus loin possible dans le puits afin de ne pas se tuer en percutant un de ses murs. Elle chuta alors à toute vitesse vers l’inconnu.

La chute fut longue, tellement longue que la jeune humaine crut qu’elle durerait éternellement, puis la percussion avec l’eau fut brutale, mais Asnath y survécut. Le sort de lévitation qu’elle avait lancé de nouveau juste avant d’entrer en contact avec l’eau avait suffit à atténuer le choc qui aurait dû être fatal. Son dos percuta violemment la surface, lui coupant le souffle et l’empêchant un instant de bouger. L’eau glacée se referma sur la prêtresse alors qu’elle luttait pour ne pas perdre connaissance.

C’est alors que sa vision s’obscurcissait et qu’elle commençait à sombrer qu’Asnath vit quelque chose dans l’eau. Quelque chose se trouvait sous l’eau, non loin d’elle. En regardant mieux, elle parvint à voir que ce qui flottait entre deux eaux était un étrange bloc de glace sombre. Presque à court d’air, l’humaine tendit la main pour essayer de l’attraper.

Lorsqu’elle s’approcha du morceau de glace, elle sentit une sorte de pulsation, comme si autour d’elle l’eau se mettait à palpiter. C’était la même sensation que lorsqu’elle avait faillit sombrer dans l’inconscience à Stratholme. Alors elle comprit. Priant pour s’être trompée, Asnath nagea vers l’objet, l’attrapa et parvint à atteindre la berge où elle put respirer.

Lorsque sa peau rentra en contact avec la glace, la sensation de bourdonnement s’accentua, accompagnée d’une douleur insurmontable. Allongée sur le sable abyssal, Asnath ne s’était jamais sentie aussi mal, et la cause de ce mal n’était pas la douleur provoquée par le cristal. C’était maintenant, seule dans cette grotte souterraine, que la jeune prêtresse acceptait d’ouvrir les yeux pour voir ce qu’elle refusait de voir et cela la faisait souffrir, terriblement.

Et tandis que l’inconscience gagnait peu à peu le pas sur sa volonté, elle revit les visages de tous ceux qui n’étaient plus là par sa faute. D’abord Reïna qui s’était sacrifiée pour elle, puis vinrent Omundron et Ellécnite, capturés par le Fléau. Ensuite apparut devant ses yeux le visage souriant de Noem’Aeda, désormais prisonnière de son tombeau de givre. Enfin Asnath se souvint de Nathaël et de la sensation de ses lèvres sur les siennes avant qu’il ne lui transperce la main pour lui faire lâcher prise.

En se remémorant leur quête à tous les cinq, elle se résolut à ne pas abandonner. Rassemblant le peu de forces qui lui restaient, Asnath rangea le morceau de glace à l’abri d’une de ses poches et sortit un cadeau. Ce cadeau que lui avait offert Noem’Aeda et qui contenait un souvenir. Le plus douloureux de ses souvenirs, un secret qu’elle avait gardé pour elle seule depuis longtemps. L’humaine observa un instant le petit cristal qui réfléchissait la faible lumière du lieu. Elle entendit alors une voix d’enfant :

- Vous n’auriez vraiment pas dû faire ça.

Les yeux émeraude de la prêtresse se tournèrent vers le petit garçon fantôme qui venait d’apparaître. Un pâle sourire se dessina sur les lèvres d’Asnath.

- Oh, il y a tellement de choses que ni toi ni moi n’aurions jamais dû faire, pensa-t-elle en fermant les yeux.

Le noir se fit autour d’elle, absorbant Asnath qui s’abandonna sans résistance à l’inconscience. Rien ne pourrait lui arriver, malheureusement.

Peu de temps après, l’air se refroidit brusquement et une Liche apparut près du lac. L’agitation dans le Cour des Ossements avait intrigué Kel’Thuzad qui avait quitté sa nécropole de Naxxramas pour rendre compte des combats dans la Désolation des Dragons, les mages mortels ayant bloqué toute tentative de communication avec la Citadelle. Il était sur le point de retourner en son domaine lorsque le tumulte avait attiré son attention.

D’après un des nécromants qu’il avait interrogé, une humaine s’était introduite tout près de la Citadelle puis était tombée dans le puits qui menait à Naz’Anak, les profondeurs oubliées. La grande Liche savait ce qui se trouvait au fond de ce puits et Kel’Thuzad était venu voir si l’humaine était bien seule, ce qui lui paraissait étrange, et si elle avait survécu. La folie de cette mortelle l’impressionnait, personne n’avait jamais essayé de s’infiltrer seul dans la Citadelle, à moins de vouloir mourir.

Les yeux glacés de la liche examinèrent les lieux à la recherche de l’intruse. Il la trouva, allongée au sol près de la rive du lac, inconsciente. Mieux valait cependant s’assurer qu’elle ne représentait plus aucun danger, le Fléau n’avait pas besoin d’une nouvelle menace. Kel’Thuzad s’avança vers le corps inanimé et son regard fut attiré par une petite sphère de cristal bleu qui se trouvait près de l’humaine.

En tant qu’ancien mage il reconnu tout de suite l’objet et le déposa au creux de sa main osseuse. Il s’assura tout d’abord que personne d’autre ne se trouvait dans les environs car tout pendant qu’il revivrait le souvenir il serait vulnérable. Il utilisa alors ses formidables pouvoirs pour briser le sceau de protection qui protégeait le souvenir puis laissa la magie opérer.

Lorsque la Liche émergea du souvenir quelques secondes plus tard, elle semblait avoir été troublée au-delà de tout ce qui aurait pu être imaginé.

- Impossible.

En guise de vérification, Kel’Thuzad se pencha sur l’humaine inconsciente et souleva les mèches de cheveux blonds qui masquaient son visage. Il se pétrifia en voyant ces traits qui lui rappelèrent de très vieux souvenirs. Il prit alors sa décision.

D’un geste de la main, la grande liche fit flotter le corps d’Asnath à quelques centimètres du sol, il devait la cacher. Trop préoccupé par l’humaine qu’il avait trouvée, Kel’Thuzad ne prit pas le temps d’examiner la surface du lac pour voir si le cristal était toujours là, s’il y avait eu un souci le sortilège de protection se serait déclenché. La liche disparut, emmenant avec lui sa découverte.

Non loin de là, un petit garçon fantôme avait observé la scène avec un mélange de peur et de profonde tristesse.

Message aux lecteurs (phoenix ou pas).

Je pense que vous n’allez pas apprécier ce que je vais vous dire mais tant pis. Nous arrivons désormais à une période doublement problématique.

Premièrement dans ma vie de tous les jours, je vais devoir me mettre à bûcher mes partiels (oui il serait dommage d’être passée en un an pour repiquer la deuxième année) donc je vais devoir un peu ralentir sur l’écriture (le premier qui dit que j’avais déjà beaucoup ralenti… gare à lui, la vérité blesse et je n’aime pas être blessée…)

Deuxièmement, nous arrivons à la partie tant redoutée (par moi) des révélations. C’est d’ailleurs en grande partie la cause de mon retard car j’avais beaucoup de mal à me convaincre d’aller jusqu’au bout de ce que j’ai commencé. Je crois que je vais donc faire quelque chose qui ne va pas vous plaire.

Je vais arrêter de publier les chapitres toutes les semaines jusqu’à ce que j’ai écrit la fin du Choix de la Lame. A ce moment là, j’enverrai tout à Bubu et irai me cacher dans un bunker antiatomique. Je vais essayer de faire le plus vite possible mais je ne vous garantis pas du tout d’avoir terminé avant la nouvelle année.

Bien évidemment j’écrirais un petit bonus de Noël comme l’an dernier (et j’essaierai de terminer la surprise de l’anniversaire mais ça c’est moins sûr).

J’espère que vous ne m’en voudrez pas trop.

Elwi, Petite plume qui n’a très très peur