La nuit parut donc bien longue à chacun, surtout pour Asnath qui se remettait doucement de sa blessure. Bien qu’elle n’ait gardé aucune séquelle physique de sa blessure, Teastraz et Sienistraza ayant refermé la plaie sans laisser de cicatrice, la prêtresse se fatiguait vite et demeurait plus fragile. Cependant, malgré le froid polaire, elle avait extrait un de ses bras de la couverture qu’elle maintenait autour d’elle et le laissait désormais subir les attaques du vent en serrant les dents.

La jeune femme n’avait parlé à personne de l’inconnue avec laquelle elle avait parlé mais ses paroles continuaient de résonner dans son esprit. L’humaine lui avait dit que le contact de ses doigts sur sa peau était l’indice le plus important, aussi Asnath se concentrait-elle sur cette étrange et glaciale caresse. Car c’était bien le froid inhumain des doigts de sa rencontre qui avait frappé la prêtresse, les deux traces glacées que ceux-ci avaient laissé sur sa joue avaient mis plusieurs minutes à se réchauffer et plongé Asnath dans l’incompréhension.

C’est pourquoi elle avait retiré son gant et dénudé son bras jusqu’au coude pour l’exposer au froid du Norfendre. Son but était d’essayer de refroidir sa peau autant que celle de l’inconnue du sanctuaire. Et tandis que son bras s’engourdissait petit à petit, la jeune humaine observait les lignes sombres de son tatouage qui s’enroulaient sur sa paume. Si le dragon bleu avait été seul, tous les cinq seraient peut-être parvenus à le vaincre, seulement il était accompagné. La prêtresse se rendit alors compte de la faible probabilité de tomber sur un ennemi isolé dans ces terres où leurs alliés étaient si peu nombreux. Lorsque la douleur l’obligea à ramener son bras à l’abri de sa couverture, Asnath posa sa main sur son cou et le résultat fut décevant. Comme elle s’y était attendue, sa peau était froide, mais elle n’avait pas l’impression que la fine couche de peau recouvrait de la glace comme elle l’avait ressenti pour l’étrange humaine.

La jeune femme abandonna donc ses réflexions et essaya de se trouver une position confortable pour dormir. Elle parvint à somnoler quelques heures et fut réveillée par l’arrivée de l’aurore. Le spectacle qui s’offrit à elle lorsqu’elle ouvrit les yeux lui coupa le souffle et elle se hâta de réveiller Noem’Aeda qui était parvenue à s’endormir.

- Qu’y a-t-il ? demanda la draeneï en ouvrant les yeux.

- Regarde !

La prêtresse n’eut pas besoin d’en dire plus et les deux amies purent contempler ensemble le paysage qu’elles avaient sous les yeux.

Leur groupe arrivant de l’est, le soleil se levait dans leur dos et éclairait de mille feux une immense cité volant dans le ciel boréal. Les rayons naissant de l’astre du jour frappait pareillement les murs de la ville et la forêt en contrebas dont les arbres de cristal réfléchissaient la lumière solaire en créant un gigantesque jeu de lumières dont les faisceaux éclairaient la cité volante de tous côtés.

- Voici Dalaran, déclara le drake bronze d’Asnath en commençant à ralentir son allure, quoi que vous cherchiez, vous le trouverez sans doute dans cette cité.

- Merci de nous aider ainsi, répondit la prêtresse.

- Dame Sienistraza nous a expliqué votre mission, poursuivit le représentant du vol Emeraude, notre race a déjà suffisamment de soucis et le Fléau reste un danger potentiel qu’il serait imprudent de laisser devenir plus puissant encore.

- De combien de temps disposons-nous avant que de repartir ? demanda Nathaël.

- Restez le temps qui vous semblera nécessaire, répondit le drake qui le transportait, nous vous attendrons.

Du coin de l’œil, Asnath aperçut Omundron, Ellécnite et Noem’Aeda discuter entre eux. D’ordinaire, elle n’aurait pas prêté attention aux conversations de ses amis, mais en voyant son frère jeter de nombreux regards dans sa direction sa curiosité fut piquée au vif. Sa surprise s’accrut encore lorsque, après avoir remarqué que la prêtresse les observait, les trois compagnons stoppèrent net leur discussion et se dispersèrent. Convaincue que c’était ses aventures récentes qui la poussaient vers la paranoïa, la jeune femme reporta son attention vers la ville aux immenses tours aériennes et aux toits pourpres.

Les murs immaculés, baignés de la lumière de l’aurore, avaient pris une multitude de teintes orangées pareilles à celles d’un incendie. Il était difficile d’imaginer que cette cité ait pu être détruite par la Légion seulement une vingtaine d’années auparavant. Les gigantesques flèches aux toits arrondis s’élançaient à l’assaut du ciel et leurs ornements d’or les faisaient briller tels d’immenses joyaux. Le jour était levé depuis moins d’une heure lorsqu’ils atterrirent et pourtant l’aire de Krasus, la gigantesque piste de décollage de la cité, était déjà animée d’un va-et-vient constant de griffons et autres créatures ou machines volantes. La ville semblait ne jamais cesser son activité, pas même la nuit.

Les cinq drakes se posèrent sur l’aire et laissèrent leurs passagers descendre. Avant de se retirer ils leurs expliquèrent qu’il y aurait en permanence l’un des leurs pour les attendre et que dès que les compagnons souhaiteraient partir ils auraient quitté Dalaran dans l’heure suivante. Les voyageurs remercièrent de nouveau leurs montures et se dirigèrent vers le cœur de la cité des mages. Une fois qu’ils se furent mis un peu à l’écart de la foule qui commençait à envahir les rues de la ville volante, Asnath demanda à ses compagnons ce qu’ils recherchaient pour pouvoir établir le parcours le plus court possible. A son grand étonnement, Noem’Aeda, Omundron et Ellécnite souhaitaient que le groupe se disperse pour aller plus vite.

- Mais… répliqua la jeune femme, comment allons-nous nous retrouver ? Sans parler de quand. Cette ville est gigantesque, qui plus est elle est volante. Il serait plus judicieux de rester grouper.

- N’y vois pas une volonté de te contredire, Asnath, répondit Noem’Aeda en posant une main sur l’épaule de son amie, mais Ellécnite, ton frère et moi avons quelques achats particuliers à effectuer.

- Quels objets peuvent être suffisamment particuliers pour que Nathaël et moi ne puissions pas venir les acheter avec vous ?

- Tu le sauras en temps voulu, petite sœur. Mais pour le moment, nous ne pouvons rien dire.

La prêtresse examina tour à tour le druide, la démoniste et la mage dans le but de desceller dans leur expression un indice qui pourrait l’aider à comprendre leur étrange comportement. Finalement elle abandonna et se résolut à les laisser s’éloigner, restant seule avec Nathaël.

- Que veux-tu faire ? demanda l’elfe de sang en s’approchant d’elle.

- Peu importe, répondit l’humaine d’un ton las, nous ne sommes arrêtés que pour nous reposer avant de poursuivre notre voyage. Je dois t’avouer que je ne suis pas ici pour admirer la beauté de cette ville.

- Mais puisque nous sommes condamnés à y rester jusqu’à ce que nos compagnons achèvent leurs emplettes, ce qui devrait leur prendre au moins deux heures, nous pourrions en profiter pour jeter un œil à ce qui nous entoure.

Malgré ses réticences et sa fatigue, Asnath finit par accepter la proposition du paladin et le suivit à travers les rues pavées de la cité volante. Aucun des deux ne connaissant la ville, ils se dirigèrent au hasard en suivant les passants qui se promenaient. Ainsi arrivèrent-ils devant une fontaine auprès de laquelle une petite foule se pressait. L’elfe et l’humaine comprirent rapidement que le monument avait des vertus magiques et pouvait exaucer les vœux de ceux qui y jetaient une pièce. Pour respecter la tradition, chacun lança une pièce dans l’eau puis ils s’éloignèrent.

- Quel était ton vœu ? demanda alors Nathaël.

- Tu n’as jamais entendu dire qu’un vœu que l’on raconte n’a plus aucune chance d’être réalisé.

- Mais tu sais aussi bien que moi que la magie ne fonctionne pas ainsi.

- Ce ne sont pas des mages qui ont ensorcelé cette fontaine, répliqua la prêtresse, s’ils avaient trouvé un moyen pour que tous leurs vœux soient exaucés crois-moi que nous verrions bien plus de mages immortels ou invincibles.

- Je préfère ne pas imaginer ce que Noem’Aeda pourrait faire si elle détenait un tel pouvoir, plaisanta le paladin.

- Tu serais déjà transformé en grenouille depuis longtemps.

- A ses yeux je suis sûr que la grenouille n’est pas un châtiment suffisant.

La jeune femme allait répondre quand la foule s’écarta brusquement sur les côtés de la rue pour laisser passer un groupe de guerriers. Elle fut surprise par le mépris que certains affichaient à l’égard de ce groupe qui fendait la foule compacte qui s’en écartait comme si ses membres étaient des malades contagieux. Le groupe était constitué de combattants de toutes races mais semblaient bien plus à l’aise entre eux qu’avec leurs peuples respectifs. Ils partageaient comme caractéristique une peau plus pâle que la normale et des yeux brillants et glaciaux. Lorsqu’ils se furent éloignés, Asnath se tourna vers Nathaël.

- Qui étaient-ce ?

- Des chevaliers de la mort, de la Lame d’Ebène, répondit l’elfe d’une voix dénuée d’émotion.

- Ne sont-ils pas sensés être nos alliés ? Pourquoi sont-ils ainsi traités ?

Le paladin ne répondit pas immédiatement et poursuivit son chemin, la jeune humaine derrière lui attendant sa réponse.

- Tu sais ce que c’est, Asnath. A la guerre toute aide est la bienvenue. La désertion de la Lame d’Ebène a eu pour double avantage d’affaiblir le Fléau et de venir renforcer nos troupes. Mais personne n’est dupe, cette alliance n’est que passagère et pragmatique. Les chevaliers de la mort n’espèrent voir le Roi Liche tomber que pour pouvoir prendre les rênes du Fléau. Ils ne peuvent pas vivre dans le même monde que nous.

- Les traiter ainsi ne peut qu’encourager leur vision des choses, argumenta la prêtresse.

- Je pense que quiconque a vu un de ses proches lui être arraché par le Fléau a de bonnes raisons de ne pas croire à la rédemption des chevaliers de la mort. Et quand bien même n’auraient-ils pas choisi de devenir ce qu’ils sont, ils n’en étaient pas moins les pièces maîtresses de l’armée du Roi Liche. Personne n’est prêt à oublier la cruauté dont ils ont fait et font toujours preuve.

Asnath réfléchit à ce que lui avait dit l’elfe alors que tous deux atteignaient la Place Tisserune où ils avaient donné rendez-vous à leurs compagnons. Comme il leur restait plus d’une heure à patienter, ils s’assirent sur un banc pour se reposer. Harassée par la fatigue, la jeune femme finit par s’endormir et fut réveillée par la voix de Noem’Aeda. Ce ne fut que lorsqu’elle ouvrit les yeux qu’elle s’aperçut qu’elle était désormais allongée sur toute la longueur du banc et que Nathaël était assis par terre.

Tout autour d’elle, ses compagnons la regardaient s’éveiller en souriant. Gênée, la prêtresse se redressa rapidement et ce qui n’eut pour effet que de déclencher le rire d’Ellécnite. Pour essayer de se rattraper, la jeune femme se tourna vers l’elfe de sang assis par terre.

- Depuis combien de temps suis-je endormie ?

- Je crois que tu as tenu à peine cinq minutes après que nous nous soyons arrêtés, répondit le paladin en souriant, et près de deux heures se sont écoulées depuis.

- Pourquoi m’avoir laissé dormir ? s’alarma l’humaine, nous devrions déjà être partis !

- Ne t’inquiète pas, nous venons tout juste d’arriver. Notre course a été un peu plus longue que prévue, la rassura Noem’Aeda.

- A ce sujet, pouvons-nous savoir de quelle nature était cette course pour que vous nous ayez abandonnés durant toute la matinée ? demanda Nathaël d’un ton sarcastique.

Leurs trois compagnons se concertèrent du regard avant de répondre. Finalement, Omundron fit signe à Noem’Aeda de prendre la parole. Celle-ci attrapa son sac et en sortit un petit paquet enveloppé de tissu et s’approcha d’Asnath.

- Voilà… c’est pour toi, lui dit la mage en lui tendant l’objet, joyeux anniversaire.

La jeune femme resta un instant interdite avant de comprendre le sens des paroles de son amie. Elle fit ensuite un rapide calcul pour savoir quel jour ils étaient et dut se rendre à l’évidence, la mage avait raison.

- M… merci, répondit-elle en prenant le cadeau avec précautions, mais… comment as-tu su ?

- Il est toujours plus pratique d’avoir un membre de la famille sous la main dans ce genre de situation, déclara la draeneï en désignant Omundron de la tête, ce cadeau est de notre part à tous les trois, même si l’idée vient de moi.

Saisie à la gorge par l’émotion, la prêtresse ne sut quoi répondre et se contenta d’observer le paquet dans ses mains.

- Qu’attends-tu pour voir ce qu’il y a dedans ? demanda Ellécnite.

- Rien, je… je suis juste encore sous le choc. Ce n’est pas vraiment le moment de se réjouir et…

- Quand sera-t-il le moment, si ce n’est maintenant ? la coupa Omundron, notre avenir devient plus incertain à chaque instant où nous nous rapprochons du glacier. Peut-être regretterons-nous plus tard de ne pas avoir profité de cet instant. D’autant plus pour moi que je n’ai pu être présent pour cet événement depuis trois ans.

- Allez, ouvre, renchérit Noem’Aeda en s’asseyant près d’elle.

Sous la pression de ses amis, Asnath défit le ruban qui maintenait le tissu en place et déballa soigneusement le paquet. Elle trouva à l’intérieur une chaîne d’argent à laquelle était accroché un médaillon. Celui-ci était constitué d’une petite pierre verte sur laquelle des runes avaient été gravées. La prêtresse prit la chaîne entre ses doigts et fit jouer la lumière du soleil au travers du médaillon.

- Il est superbe, déclara-t-elle, le souffle coupé, c’est une émeraude ?

- Oui, mais particulière, précisa Ellécnite.

- Que veux-tu dire ?

- C’est ce que l’on appelle une pierre de souvenir, expliqua la draeneï, tu peux y garder un de tes souvenirs, pour ne pas l’oublier, pour ne pas qu’il s’efface. Une fois que tu as déposé ton souvenir à l’intérieur de la pierre, tu peux le revivre à tout moment ou le faire partager à quelqu’un si tu le souhaites. Cette pierre n’appartient qu’à toi et seuls les plus puissants magiciens sont capables de briser les sortilèges qui l’entourent et d’accéder au souvenir que tu y conserves. Je t’expliquerai comment t’en servir.

La jeune humaine observa un long moment la pierre verte sans rien dire. Ses doigts suivirent distraitement le tracé des glyphes gravés dans le médaillon alors qu’elle réfléchissait au souvenir qu’elle y mettrait à l’abri.

- Merci… beaucoup, à tous les trois.

- Ce n’est rien, répondit la gnome, mais nous devons reprendre notre route. Si nous voulons avoir une chance de rattraper les morts-vivants il ne faut pas tarder.

- Oui, acquiesça Asnath en se levant, allons-y.

En suivant ses compagnons, la prêtresse tenta en vain d’attacher la chaîne d’argent autour de son cou. Nathaël arriva derrière elle et la lui prit délicatement des mains pour accrocher le fermoir.

- Je suis navré de n’avoir rien à t’offrir, déclara le paladin à mi-voix pour ne pas être entendu des autres.

- Ne t’en fais pas, répondit Asnath en se tournant vers lui, tu ne pouvais pas savoir. Et il faut garder à l’esprit que nous ne fêtons pas le jour de ma naissance mais celui de mon arrivée au couvent. De ce point de vue, même eux sont en retard.

Leur conversation n’alla pas plus loin et le groupe rejoignit l’aire de Krasus où le drake rouge les attendait. En les voyant arriver, il décolla et revint quelques minutes plus tard avec ses compagnons. Les voyageurs s’installèrent rapidement en selle et une fois que tous furent prêts, les imposants reptiles prirent leur envol et piquèrent vers le nord.

- Où souhaitez-vous aller ? demanda le drake bleu de Noem’Aeda tandis qu’ils s’éloignaient rapidement de Dalaran.

- Volez jusqu’au barrage Mur-de-Fer, ordonna la mage en désignant l’immense trait sombre qui barrait l’horizon, une fois là-bas, nous verrons si les morts-vivants sont déjà passés ou non.

- Je croyais que tu avais perdu ton artefact à Stratholme, répliqua Nathaël.

La draeneï ouvrit sa sacoche et en sortit un objet identique à celui qu’elle avait utilisé lors du sauvetage d’Omundron et Tassanya.

- J’en ai acheté un nouveau. L’avantage de faire escale dans une ville de mage est qu’il est possible de trouver n’importe quel type d’objet magique parmi les plus puissants.

- Parfait, déclara Asnath, mais pourquoi ne pas utiliser le sortilège qui nous a permis de comprendre que les morts-vivants nous avaient devancés sur la Côte Oubliée ?

- Sa portée n’est pas assez grande. Sur le glacier les troupes du Fléau pourront aller où bon leur semble, leur trajet pourra être énormément dévié de ce que nous avons prévu. Dans la désolation des Dragons, ils ne pouvaient accoster qu’à un seul endroit. Désormais nous ne pouvons plus être sûrs du chemin qu’ils emprunteront.

- Très bien mais essayons de ne pas trop nous enfoncer vers l’est. Si jamais ils nous ont devancés il serait préférable de ne pas nous être éloignés de la Citadelle. Nous ne pouvons nous permettre d’autres erreurs.

Il fallut une journée de plus aux drakes pour atteindre le barrage qui marquait la frontière entre la Forêt du Chant de Cristal et le glacier de la Couronne de Glace, terres du Fléau.

Le paysage du glacier tranchait radicalement avec celui de la forêt, l’orange et le violet de celle-ci cédant la place aux camaïeux de gris et de bleu de l’immensité gelée. Le ciel obstrué de noirs nuages était chargé de lourdes menaces qui semblaient planer comme un avertissement à quiconque osait s’aventurer en ces terres impies. Seul le vent venait murmurer aux voyageurs milles menaces et lorsque celui-ci enfin se taisait, ce n’était plus que le silence angoissant de la mort qui empreignait l’atmosphère de toute sa terrifiante puissance. Tout en ces lieux ne faisait que confirmer aux cinq compagnons qu’ici se déroulerait la dernière partie de leur voyage, et que l’issue en était plus qu’incertaine.

La zone étant trop dangereuse pour tenter de se poser, les drakes se dirigèrent vers l’est du barrage où s’élevaient quelques montagnes sur lesquelles ils purent atterrir sans crainte. Dès qu’elle le put, Noem’Aeda sauta de sa monture et se hâta d’activer son artéfact afin de détecter la présence du Diadème et de la Rune. Le juron suivit d’un cri de désespoir qu’elle laissa échapper fit immédiatement comprendre à tous que les nouvelles n’étaient pas bonne.

- Depuis combien de jours sont-ils passés ? demanda Asnath sans même s’enquérir de la raison de la réaction de son amie.

- Hier, répondit la draeneï, hésitant entre colère et résignation, ils sont passés hier.

- Comment ont-ils put aller aussi vite ? questionna Omundron, ont-ils prit un chemin auquel nous n’aurions pas pensé ?

- Non, ils sont bien passés par les Pics.

- Alors comment ? insista Nathaël en donnant un violent coup de pied dans une roche qui traînait non loin de lui.

- Ils ne dorment pas, expliqua Ellécnite d’une voix lasse.

Ses quatre compagnons se tournèrent d’un seul ensemble vers la démoniste qui était restée en retrait sur un rocher affleurant.

- Je me suis suffisamment battue contre les morts-vivants pour savoir qu’ils attaquent à n’importe quelle heure du jour et de la nuit et que même si une bataille doit durer des jours, eux ne fatigueront pas. Le fait qu’ils aient maintenu leur avance malgré l’avantage que nous fournissaient les drake ne m’étonne guère. Et si je peux me permettre, nous ferions mieux de nous mettre en route dès maintenant si nous souhaitons les rattraper.

- Tu aurais pu nous le dire plus tôt ! s’emporta Asnath en se dirigeant vers la gnome.

- A quoi bon ? répliqua celle-ci sans se départir de son calme ce qui eut pour effet d’aviver la colère de la prêtresse, pour que nous cessions de dormir afin de les rattraper ? Quels fiers combattants aurions-nous fait ! Epuisés, incapables d’aligner trois mots, alors que penser d’une incantation ou de manier une épée !

- Mais au moins aurions-nous su à quoi nous attendre ! Comptais-tu nous laisser poursuivre notre chasse au Fléau encore longtemps ?

- Calme-toi Asnath, essaya d’intervenir Omundron.

- Non ! Je refuse de me calmer ! Contrairement à toi, je m’intéresse aux Reliques et à la mémoire de tous ceux que le Fléau a massacré pour les récupérer. Tout le monde remonte en selle et nous partons, maintenant !

La prêtresse monta sur le drake le plus proche d’elle et s’installa.

- Asnath, remarqua Noem’Aeda, tu es montée sur le drake d’Ellécnite.

- Peu importe ! En route !

Sans attendre ses compagnons, l’humaine fit décoller le drake noir sur lequel elle était montée et partit en tête. Noem’Aeda et Nathaël furent les plus rapides et se portèrent à sa hauteur mais aucun ne dit mot. La prêtresse continua de fulminer en silence, la révélation d’Ellécnite prenait pour elle des allures de trahison. Comment la démoniste avait-elle pu les laisser ainsi s’enfoncer dans l’erreur sans rien dire ?

A force de ruminer ses pensées, Asnath ne se rendit pas compte que quelque chose d’anormal était en train de se produire.

- Asnath, je crois qu’Ellécnite a un problème, cria Nathaël.

- Qu’elle se débrouille avec !

- Asnath !

Cette fois c’était Omundron qui avait crié. La prêtresse se retourna et eut tout juste le temps de voir le drake rouge qu’avait prit Ellécnite tomber en chute libre vers le sol, aux prises avec une wyrm de givre.