Alors que sa conscience s’abîmait dans le néant qui l’entourait, la prêtresse se sentit comme aspirée dans un autre univers et le froid disparut brusquement. Elle eut l’impression qu’on lui avait fait inhaler une boule de feu qui incendiait sa poitrine d’une douleur intenable. La jeune femme aurait voulu tousser, expulser ce brasero qui la brûlait de l’intérieur. Elle ne parvint qu’à inspirer profondément et la flamme sembla s’aviver de plus belle. Il lui fallut longtemps avant de comprendre qu’il ne s’agissait plus d’un des rêves qui l’avaient bercée depuis sa plongée dans les ténèbres.

Asnath se raccrocha à cette sensation, plus réelle que les autres, et tenta de ne pas lâcher prise de nouveau. Une lueur d’espoir venait de s’illuminer dans son cœur, cette flamme qui brûlait en elle était porteuse d’une promesse que la prêtresse ne souhaitait pas voir engloutie dans le néant. Un bref instant, elle crut même apercevoir de la lumière, avant qu’une violente douleur la déchire. Terrassée, Asnath oublia un instant la flamme d’espoir qui s’amenuisa en un instant, plongeant de nouveau la jeune femme dans son univers obscur. Mais la brûlure ne disparut pas complètement, tout comme la douleur et, lentement, l’humaine trouva la force nécessaire pour s’accrocher de nouveau à la flamme qui entama son chemin vers la lumière.

Lorsqu’elle ouvrit les yeux, Asnath ne vit rien pendant si longtemps qu’elle crut être devenue aveugle. Ce ne fut qu’après que ses yeux se soient adaptés à l’obscurité qu’elle remarqua qu’elle se trouvait dans une salle plongée dans le noir. Ne parvenant pas à se convaincre qu’elle était encore en vie, la prêtresse se leva sans hésitation du lit rudimentaire qui lui avait été confectionné. Incapable de se repérer dans le noir, elle murmura d’une voix rauque quelques mots et une faible lumière se diffusa du bout de ses doigts.

Avant même que l’humaine puisse esquisser un mouvement, un pan de toile qui recouvrait un mur se leva et la lumière du jour se déversa dans la salle. En contrejour, Asnath aperçut la silhouette d’une elfe de sang qui maintenait la toile. Celle-ci ne dit rien et se contenta de faire signe à la blessée de la suivre. Avec hésitation, celle-ci fit quelques pas et parvint ainsi jusqu’à l’elfe qui se contenta de la fixer étrangement.

- Tes amis t’attendent, finit-elle par dire en désignant l’extérieur de la pièce, il n’a pas été aisé de les empêcher de venir te voir.

- M… merci, parvint à articuler la jeune femme, mais comment…

- Je sais qu’ils te l’expliqueront dès que tu les auras retrouvés, la coupa l’elfe avec un sourire à la fois énigmatique et réconfortant, va, je suis sûre que tu souhaites les rejoindre.

Retenant les questions qui lui brûlaient les lèvres, Asnath jeta un œil vers le couloir rocheux que lui indiquait son interlocutrice mais lorsque son regard revint vers elle, l’elfe avait disparu. Examinant les alentours à la recherche de sa mystérieuse rencontre, la prêtresse entreprit de suivre le corridor qui lui semblait sans issue. Pendant qu’elle avançait, elle en profita pour observer les lieux dans l’espoir de comprendre où elle se trouvait.

Ce que l’humaine avait initialement prit pour de la lumière solaire n’était en réalité que le résultat de la phosphorescence de pierres situées tout au long de son chemin. Au loin, elle parvint à entrevoir une lueur différente des autres, plus chaude, qui lui rappela brièvement celle qui l’avait menée hors des ténèbres. Mais à force de marcher vers cette lumière qui ne semblait pas se rapprocher, la prêtresse perdit rapidement le peu de forces qu’elle avait recouvré elle dut s’appuyer contre le mur rocheux pour ne pas perdre l’équilibre.

Après quelques minutes passées à progresser dans le tunnel, Asnath entendit des bruits de pas feutrés s’approcher d’elle. Trop faible pour faire quoi que ce soit, elle se laissa tomber sur le sol, adossée au mur, et attendit. Elle avait reconnu le son des pattes d’Omundron dès qu’elle l’avait entendu, aussi ne craignait-elle aucun danger. Lorsque le grand félin émergea de l’ombre, l’humaine crut un instant qu’il allait se transformer mais il n’en fit rien. Il se contenta de venir se coller fortement à elle dans une sorte d’étrange étreinte.

- Je dois t’avouer que je ne pensais vraiment jamais t’entendre ronronner, déclara la prêtresse dans un murmure tout en enfouissant sa tête dans la fourrure du druide.

- Si tu savais à quel point j’ai souffert, répondit Omundron de sa voix altérée, ne refais jamais cela, tu m’entends ? Jamais !

- Pourquoi suis-je encore en vie ?

- Tu as eu de la chance, répondit l’elfe en faisant basculer sa sœur sur son dos, beaucoup de chance.

Alors que le druide s’élançait dans le tunnel pour rejoindre la lumière du feu que l’on pouvait désormais deviner au loin, Asnath tenta d’arranger ses idées et les questions qu’elle souhaitait lui poser.

- Noem’Aeda et Nathaël vont-ils bien ?

- Si par bien tu entends s’inquiéter pour toi jour et nuit depuis trois jours, alors oui ils vont bien.

- Trois jours… c’est beaucoup trop long, nous avons perdu du temps.

- Asnath, tu n’as pas idée de ce qui s’est passé ! Ce n’est pas trois jours que tu aurais pu perdre mais bien ta vie !

- Je dois vous remercier Nathaël et toi de m’avoir sauvée.

- Ce n’est à aucun de nous que tu dois des remerciements. Bien que cela soit une bien maigre récompense pour ce qu’ils ont fait.

Le couloir déboucha enfin sur l’entrée d’une grotte s’ouvrant sur un désert de sable. Près du feu étaient assis ses compagnons ainsi que deux elfes, la première était celle qu’Asnath avait vu à son réveil, le second lui était inconnu. En la voyant arriver, Noem’Aeda sauta sur ses pieds et vint aider son amie à mettre pied à terre. Une fois la prêtresse équilibrée, la draeneï la serra dans ses bras et la jeune femme sentit ses larmes couler le long de son cou.

- Merci, murmura-t-elle en retenant un sanglot.

- Ce n’est rien. Mais moi, qui dois-je remercier ?

La mage lança un regard interrogateur aux deux inconnus et attendit que l’elfe mâle lui réponde par un signe approbateur pour mener son amie vers le feu et la fit s’asseoir. Pendant ce temps, Omundron avait repris son apparence usuelle et s’était assis près de sa sœur.

- Asnath, je ne sais comment t’expliquer tout ce qui s’est passé. Après que le dragon bleu t’a blessée, tu es… morte.

La révélation fit l’effet d’un coup de poing à la jeune femme qui dut planter ses doigts dans le sol caillouteux pour ne pas s’évanouir. Le regard de ses autres compagnons lui permit de s’assurer que les paroles de Noem’Aeda étaient vraies. Elle se tourna alors machinalement vers la draeneï.

- Le sommes-nous tous ? demanda-t-elle d’une voix absente.

- Non, toi non plus d’ailleurs. C’est à eux que tu le dois.

D’un geste, la mage désigna les deux elfes qui étaient assis à l’écart et qui continuaient de l’observer. Finalement, celui qu’elle n’avait pas encore rencontré prit la parole.

- Je me nomme Teastraz et voici ma compagne, Sienistraza, nous sommes des dragons du Vol Rouge, gouverné par Alexstraza, la Lieuse de Vie. Nous étions tous deux en patrouille pour surveiller les activités du Vol Bleu lorsque vous avez été attaqués.

- L’éclair rubis qui terrasse la mer d’azur… murmura la prêtresse pour elle-même.

- C’est exact, confirma Sienistraza, après que nous ayons achevé le bleu, nous sommes venus porter secours à votre groupe. Quand nous sommes arrivés, vos amis avaient liquidé les chasseurs de mage et s’occupaient désormais de vous.

- Il était cependant trop tard pour qu’ils puissent faire quelque chose. Nous étions les seuls à encore pouvoir vous venir en aide pour vous ramener avant que vous ne les quittiez définitivement.

- La flamme qui m’a sauvée… vous en étiez à l’origine ?

- Oui, à deux nous avons été capables de vous rappeler, vous n’étiez pas encore perdue, expliqua Teastraz, mais nous n’aurions put attendre plus. Nos pouvoirs ont des limites et vous vous en approchiez à grands pas.

Asnath acquiesça avec difficulté, il lui était difficile d’imaginer qu’elle ait pu mourir, si brièvement que ce fut. Les souvenirs même de ce qui s’était passé avant son réveil s’estompaient dans sa mémoire, laissant un vide qu’elle ne pouvait combler. Pour se donner contenance, elle promena son regard sur ses compagnons regroupés près du feu.

Ellécnite et Omundron n’avaient pas été blessés mais ils portaient sur leurs visages les traces de plusieurs nuits blanches. Nathaël semblait être parvenu à soigner son bras, à moins que les dragons ne l’aient fait pour lui, et seule la gène qu’il laissait transparaître lorsqu’il se servait de son membre blessé trahissait l’existence de la récente fracture. Enfin, Noem’Aeda portait sur la joue une ligne longue et mince, d’un bleu plus foncé que sa peau, dernière trace de ses deux chutes de cheval.

En voyant que personne ne semblait poursuivre le récit des trois derniers jours, Asnath fut obligée de poser les questions auxquelles elle n’avait pas de réponse.

- Où sommes-nous ? demanda-t-elle en tournant la tête vers l’étrange désert qui s’étendant à l’extérieur de la grotte.

- Au sanctuaire draconique de Bronze, expliqua Sienistraza sans même accorder un regard au désert, c’est le seul sanctuaire où nous pouvons être encore en sécurité… pour le moment.

- Nous étions tout près de ce lieu lorsque nous vous avons trouvés, poursuivit son compagnon, de plus les autres sanctuaires draconiques sont désormais inaccessibles.

- Les dragons bleus nous attaquent et nous ne pouvons faire confiance au Vol Noir, de plus Ysera la Rêveuse est plongée dans le Cauchemar d’Emeraude, les créatures de son sanctuaire la protègent en attaquant quiconque pénètre leur territoire. Enfin, notre propre sanctuaire est sans cesse la cible du Fléau. Ici au moins, le combat qui se déroule est limité aux espaces parallèles que créent les dragons de Bronze et le Vol infini.

- Vous voulez dire que ce lieu se trouve hors du temps ? s’enquit Asnath, ébahie par ce qu’elle entendait.

Elle scruta le sanctuaire à l’extérieur de la grotte, espérant y trouver une preuve que le temps s’y écoulait de manière différente. Cette idée lui redonna de l’espoir car si le temps ne se comportait pas de la même manière entre le sanctuaire et le reste du monde, alors cela signifiait que le retard qu’ils avaient sur les troupes du Fléau n’était peut-être pas aussi considérable que ce qu’elle avait pensé.

- Non, répondit Teastraz, détruisant ainsi les espoirs de la prêtresse, ce lieu est en réalité situé dans toutes les époques à la fois. Nos frères de bronze sont capables de voyager entre les strates temporelles et ici ils peuvent aller de l’une à l’autre sans encombre. Du moins le pouvaient-ils autrefois. Ce que votre frère vous a dit était la vérité, humaine, vous avez passé trois jours ici, et la même durée s’est écoulée à l’extérieur.

La prêtresse poussa un profond soupir et se leva. En la voyant se diriger vers l’entrée de la grotte, Omundron réagit immédiatement.

- Où vas-tu ?

- Dehors, répondit la jeune femme sans se retourner, j’ai besoin de réfléchir à la façon dont nous allons pouvoir rattraper le temps perdu.

- Tu n’as rien à te reprocher Asnath, intervint Ellécnite en lui lançant un regard dur, le regard de quelqu’un qui parle à un innocent persuadé de sa culpabilité, tu n’es pas responsable de ce qui est arrivé.

- Peu importe, répliqua l’humaine en poursuivant son chemin vers la lumière du jour, ce n’est pas en se soulageant mutuellement de nos responsabilités que nous parviendrons à trouver une solution.

- Prenez garde, humaine, la prévint Teastraz avant qu’elle ne quitte la grotte, passé et futur se mêlent en ce lieu, vous pourriez traverser une faille temporelle par inadvertance, auquel cas il vous serait difficile de revenir en arrière.

La prêtresse écouta à peine les recommandations du dragon, si elle se retrouvait dans une autre époque peut-être les catastrophes cesseraient-elles de pleuvoir. Mais plus que l’envie de s’isoler, c’était un autre sentiment qui poussait la jeune femme à s’enfoncer dans le désert temporel. Quelque chose l’attirait là-bas, sans qu’elle parvienne à savoir quoi, quelque chose avec laquelle elle semblait entrer en résonnance. Ne sachant où chercher, elle décida d’errer quelques instants entre les gigantesques ossements qui émergeaient par endroit du sable doré.

Alors qu’elle s’apprêtait à faire demi-tour, n’ayant rien trouvé dans l’immensité désertique, Asnath entendit quelqu’un l’appeler. La voix semblait humaine, bien que la jeune femme ne parvienne pas à en être sûre. En revanche elle était persuadée d’avoir entendu son nom. En tendant l’oreille, elle se dirigea vers le squelette le plus proche, le seul dont le crâne n’avait pas été englouti dans le sable. Au détour de l’obstacle, la prêtresse entendit de nouveau la voix, derrière elle.

- Bonjour Asnath.

L’interpellée fit volte-face et tomba nez-à-nez avec une inconnue adossée à un os. Asnath remarqua immédiatement qu’elle et sa nouvelle rencontre étaient toutes deux à l’abri des regards pouvant venir de la grotte.

- C’est un peu tard pour t’en rendre compte, déclara la silhouette masquée en se redressant, prends garde, ce genre d’inattention pourrait te jouer des tours.

La jeune femme détailla son interlocutrice de la tête aux pieds avant de lui répondre. La seule conclusion qu’elle put tirer fut que l’inconnue est une humaine qui faisait plus ou moins sa taille. Sa tête était recouverte d’une capuche qui masquait laissait la plus grande partie de son visage dans l’ombre. Seuls ses yeux étaient visibles et des flammes bleues semblaient y brûler. Elle portait une ample cape noire qui recouvrait le reste de son corps, dissimulant sans doute une arme. Mais ce qui avait le plus frappé Asnath n’était pas l’apparence de cette étrange humaine, c’était sa voix. Indéniablement humaine, elle était cependant déformée, comme si elle résonnait.

- Qui êtes-vous ? demanda la prêtresse avec méfiance tout en reculant d’un pas.

- Ne te fatigue pas à essayer de te mettre dans le champ de vision de tes amis, répliqua l’inconnue d’une voix sarcastique, Noem’Aeda va arriver dans quelques minutes, juste le temps pour moi de venir te voir.

- Vous n’avez pas répondu à ma question, rétorqua Asnath d’une voix glaciale.

- Ah oui, tu souhaites savoir qui je suis… sauf que cela serait bien moins intéressant si je te le disais maintenant alors, je vais te donner quelques indices. Mais comme je préfère éviter la triche…

Asnath n’eut pas le temps de réagir que l’inconnue se trouvait déjà derrière elle et lui maintenait le bras gauche tordu dans le dos pour l’empêcher de bouger. Presque délicatement, elle mena la prêtresse près du squelette et la plaqua contre l’os. Une fois la jeune femme immobilisée, elle se pencha à son oreille pour murmurer.

- Je fais partie de ton histoire et tu me connais. Je hanterai tes jours jusqu’à ce que tu découvre mon identité mais à ce moment là tu ne ressentiras rien contre moi. Tu ne trouveras pas la question à cette énigme tout de suite. En réalité je peux te promettre que tu ne la résoudras que dans un mois. Et, voici mon dernier indice, le plus important pour toi.

L’humaine dégagea une de ses mains et Asnath l’entendit retirer son gant, cependant elle ne pouvait pas la voir agir. Comme elle s’attendait au pire, la prêtresse fut stupéfiée lorsque celle qui la maintenait immobile passa deux de ses doigts sur sa joue. La peau de ceux-ci était glaciale, bien plus qu’il ne l’aurait été possible pour un être humain. Elle se remémora alors immédiatement que son énigmatique interlocutrice ne produisait pas de vapeur lorsqu’elle parlait alors qu’il gelait à pierre fendre. Comment pouvait-elle être aussi froide ?

- Voilà Noem’Aeda, à bientôt Asnath, reprit la voix de l’étrange humaine, pense à moi.

La pression sur son bras décrut soudainement et la prêtresse se retourna immédiatement pour intercepter l’inconnue mais celle-ci avait déjà disparu. Comme annoncé, Noem’Aeda fit son apparition quelques secondes plus tard.

- Ah, tu es là, je commençais à m’inquiéter, commença la mage avant de s’interrompre en voyant le visage de son amie, qui y a-t-il, Asnath ?

- Rien, répondit la jeune humaine en touchant distraitement sa joue, pourquoi es-tu là ?

- Je voulais te remercier.

- Ce n’est pas nécessaire, tu le sais. Tu aurais fait la même chose.

- Nous avons rarement l’occasion de pouvoir remercier quelqu’un qui s’est sacrifié pour nous.

- C’est vrai, admit la prêtresse.

- Mais en effet je ne venais pas que pour te dire ce que tu sais déjà. Les dragons ont trouvé un moyen de regagner le temps perdu. Ce qu’ils nous proposent nous permettrait d’atteindre Dalaran demain matin. J’ai pensé que cela pouvait t’intéresser.

La jeune femme jeta un dernier regard vers l’os sur lequel avait était adossée l’étrange apparition avant de se tourner vers la draeneï.

- Allons-y, il me tarde d’entendre ce que les dragons ont à nous dire.

Les deux amies regagnèrent la grotte dans laquelle ses compagnons avaient déjà éteint le feu et regroupé leurs affaires. Lors de l’attaque des chasseurs de mages leurs montures avaient été tuées ou effrayées, les sacs qu’elles portaient avaient donc été irrémédiablement perdus, allégeant encore leurs paquetages déjà minces.

Teastraz discutait avec Omundron et Ellécnite tandis que Nathaël aiguisait le fil de son épée. Sienistraza en revanche n’était visible nulle part. Les regards se tournèrent vers Asnath lorsque celle-ci pénétra dans la grotte. Tentant d’ignorer les questions qu’elle pouvait lire sur les visages de chacun, la prêtresse s’approcha du dragon.

- Noem’Aeda m’a dit que vous aviez une proposition à nous faire quant à notre problème de transport. Pouvez-vous réellement nous aider ?

- Oui, nous le pouvons, répondit Teastraz, Sienistraza est partie demander de l’aide à certains des nôtres, elle sera revenue dans peu de temps. Si vous me permettez je vais aller à sa rencontre.

La jeune femme hocha la tête en signe de remerciement puis se retourna vers le druide et la démoniste et sa question dut paraître suffisamment évidente pour que la gnome prenne la parole sans attendre qu’Asnath ne parle.

- Nous leurs avons expliqué notre situation. Ils vont demander à des drakes de nous véhiculer jusqu’à notre destination. La seule condition est que nous les renvoyions dès que nous déciderons de poursuivre à pied. Ils ne veulent pas faire prendre de risques inutiles aux leurs.

- Ce qui est parfaitement compréhensible, poursuivit la prêtresse.

- Te sens-tu capable de poursuivre le voyage dès maintenant ? demanda Omundron d’un air soucieux.

- Toujours plus que si nous devions le faire à pied. Ne t’en fais pas, mon frère, je vais bien.

Malgré ses paroles rassurantes, Asnath savait que l’elfe ne la croyait qu’à peine aussi choisit-elle d’échapper à un nouveau surplus de protection fraternelle en allant rejoindre Nathaël. Elle s’assit un instant sans rien dire, se contentant d’observer le va et vient de la pierre le long de la lame. La jeune femme pouvait apercevoir son propre reflet déformé dans l’acier étincelant.

- Comment va ton bras ? demanda-t-elle finalement.

- Il me faudra quelques jours pour récupérer complètement mais rien de grave.

- Je voulais te demander… poursuivit l’humaine en hésitant, lorsque j’ai sombré, j’ai cru entendre ta voix.

La main du paladin suspendit son mouvement et il leva la tête vers la prêtresse. Contrairement à son habitude, il semblait gêné.

- Oui… en effet tu as du m’entendre. Je… c’était un avertissement, quand j’ai vu le dragon prêt à vous achever… pour vous mettre en garde.

- Ah, très bien.

Asnath se leva pour rejoindre l’entrée de la grotte d’où elle voyait Teastraz réagir à quelque chose qu’il avait vu dans le ciel.

- Mais je ne vois pas à quoi cela aurait servi vu qu’il était évident que je ne pouvais plus t’entendre… ajouta-t-elle cependant avant de s’éloigner.

Soudain un bruit d’ailes battant le vent se fit entendre dans le désert du sanctuaire. Intrigués, les cinq compagnons sortirent à temps pour voir Sienistraza se poser en compagnie de cinq drakes de taille plus modeste que l’imposante dragonne qui conserva sa forme naturelle malgré l’approche du petit groupe tandis que Teastraz ressemblait toujours à un elfe. Ce fut celui-ci qui s’adressa à ceux qui s’approchaient de lui.

- Ces drakes sont de loin bien plus rapides que vos griffons et leur intelligence égale la vôtre. Ils vous mèneront à Dalaran puis à la Couronne de Glace, là où votre mission vous mènera. Protégez-les comme ils vous protègeront car ils sont ici volontairement.

- Nous vous remercions pour tout ce que vous avez fait pour nous, répondit Asnath en saluant les dragons, et dans mon cas je pense qu’il est inutile de vous rappeler que je vous dois la vie et que je vous en serai reconnaissante jusqu’à ma mort.

- Prenez garde lorsque vous survolerez le glacier, dit Sienistraza de sa voix millénaire, les wyrms tenteront de vous attaquer en vol à la première occasion.

Tous les cinq acquiescèrent et les deux dragons reprirent leur envol. Immédiatement après, chacun arrima son paquetage sur un de drakes et se mit en selle. Chacune des montures représentait un vol draconique différent, Teastraz leur avait expliqué que les dragons rouges tentaient de préserver certains dragons bleus et noirs de l’influence de leurs Aspects. Omundron et le représentant du Vol Vert se choisirent mutuellement, Ellécnite enfourcha le drake noir et Noem’Aeda, peu rancunière, se mit en selle sur le bleu. Nathaël prit finalement place sur le dos du drake rouge et Asnath fit donc équipe avec celui du Vol de bronze.

- Sommes-nous prêts ? demanda la prêtresse une fois en selle.

Lorsqu’elle se fut assurée que tous étaient parés au départ, elle donna à son drake l’autorisation de décoller et le grand reptile déploya ses ailes. Les cinq formes ailées s’élancèrent dans le ciel clair du Norfendre, en direction de la grande Dalaran. Les troupes du Fléau avaient certes beaucoup d’avance, mais ils n’avaient pas dit leur dernier mot.